mercredi 22 janvier 2014

La confrontation de la société occidentale avec des sociétés non occidentales: ma chronique du 19 janvier

Ma chronique du 19 janvier dans l'émission Lumière de l'orthodoxie (textes et podcast), sur Radio Notre-Dame, partant d'un discours récent du patriarche de Géorgie, abordait la question des confrontations de différentes sociétés à l'échelle mondiale et plus particulièrement de la société occidentale avec des sociétés non-occidentales. En voici le texte:

Dernièrement, le patriarche de Géorgie Elie II, dans son message pour la fête de la Nativité, a demandé à l’Union européenne de prendre en compte l’aspiration de son pays à préserver ses valeurs traditionnelles. Il a souligné que l’Union européenne ne doit pas essayer d’implanter des idéaux étrangers à la Géorgie comme le mariage de personnes de même sexe. Ce n’est pas la première fois qu’il évoque cette question et fait cette demande. Pour comprendre la portée de son propos, son poids et sa représentativité, il faut savoir que, selon les sondages, le patriarche Elie de Géorgie est la personne la plus populaire du pays.

Cette question ne concerne pas seulement la Géorgie et pas seulement la question du mariage de personnes de même sexe. Dans de nombreux pays d’Europe, d’Asie, d’Afrique et d’Amérique, des voix s’élèvent, des masses protestent avec vigueur, contre un modèle de société, à la fois libéral, occidental et consumériste, qui est imposé à ces pays en dépit de la protestation du plus grand nombre. Sans doute faut-il employer le terme de néo-colonialisme, mais à la différence des colonialismes d’antan, il ne se fait pas au nom d’une nation, mais d’un type de société et d’intérêts trans-nationaux.

Le patriarche Elie II a simplement demandé que l’on respecte ce que pensent les Géorgiens. Il a ajouté que ce respect permettrait d’approfondir l’attachement de son pays à l’Europe.

L’Église orthodoxe des pays concernés fait souvent entendre sa voix sur ce sujet. Il est regrettable que de nombreux médias occidentaux n’en retiennent que des extraits de déclarations mises en avant pour susciter la polémique, parfois de personnes non représentatives, au lieu de développer une analyse plus approfondie, au lieu d’essayer de comprendre l’autre avec son histoire, son contexte, ses rêves et ses peurs pour mieux dialoguer et avancer avec lui.

Un bon nombre de ces pays ont connu au XXe siècle, la dévastation du totalitarisme communiste. L’Église est souvent la seule institution historique à avoir résisté à cette longue tourmente, malgré les terribles coups portés. Ce n’est pas pour démissionner maintenant face à un nouveau pouvoir qui tente d’imposer ses vues. Les promesses de lendemains qui chantent accompagnés de toutes sortes de destructions, ces peuples les connaissent et ont payé un prix colossalement élevé pour cela.

Alors que ces pays se reconstruisent, et seraient en droit d’attendre une aide internationale, fruit d’une solidarité désintéressée, ils sont obligés de se défendre contre des entreprises de main mise.

C’est d’autant plus regrettable que ces peuples ont par ailleurs une bonne, voire très bonne, opinion des pays d’Europe occidentale. Au lieu de travailler avec eux et de construire des relations de confiance, fructueuses pour tous et offrant un magnifique témoignage au monde, il semblerait que les démons du pouvoir et de la domination président toujours aux relations.

Pourtant que de richesses pourrait-on retirer de véritables échanges, dans le respect mutuel, par delà les différences. Finalement, on se prend à penser que malgré les discours et le changement de la façade, nous agissons en ce début de XXIe siècle presque pareillement qu’à la fin du XIXe siècle, en pleine vague de colonisation qui s’habillait, pour légitimer sa domination, de la prétention de diffuser la civilisation par excellence.

Une autre terrible question se pose alors : se peut-il que les deux guerres mondiales, la guerre froide, les différentes guerres et malheurs du XXe siècle, les totalitarismes au coût humain effrayant, les génocides, ne nous aient rien appris à nous êtres humains du XXIe siècle ?